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Partistare
10 janvier 2005

L'Illumination (1)

(A la demande unanime de mon seul et unique fan - sois-en ici remercié, Feuveu* ! - reprise.)

Oui, bon, j'ai été un peu paresseux ces derniers temps,mais c'est pas de ma faute, c'est parce que j'ai eu l'Illumination (Alors je voudrais bien vous y voir, vous, d'abord, quand  vous avez à gérer les affaires courantes tout en ayant l'Illumination. C'est pas évident, il faut s'organiser.)

En ce tout début d'année 2005, donc, j'ai eu l'Illumination.

En plus, j'ai eu l'Illumination à un de ces moments dans la vie où on s'y attend le moins, un de ces moments où on pense pouvoir baisser sa garde trente secondes, ne penser à rien, se laisser porter à contempler le triste monde tout en fourrant ses doigts dans son nez (avec l'assurance du voyageur qui sait qu'ici, loin de tout, de toutes façons personne de sa connaissance ne viendra lui demander en arrivant par derrière si l'on veut également utiliser ses doigts) : j'étais dans le métro. Dans la ligne 4 qui m'emmenait vers la garçonnière Orfèvrière de mon ami A pour un de ces dîners "entre hommes" que nous apprécions tant, nous, les hommes (jusqu'ici tout se tient).

J'étais en train de ruminer pour la énième fois mon métier qui m'emmerde, essayant vaguement du même coup d'imaginer ce que j'allais bien pouvoir manigancer (ou ce que l'existence allait bien pouvoir manigancer) pour m'en sortir (mais il ne faut pas trop compter sur l'existence. Je veux dire : parfois ça marche, parfois il arrive des choses auxquelles on ne s'attendait pas, et qui vous remettent sur les rails, vous emmènent enfin vers la destination que vous aviez demandé quand vous étiez tout petit... mais comme dit la blague de la mère qui demande au Rabbin de prier pour son fils boxeur sur le point d'entrer sur le ring : "s'il sait aussi cogner, ça peut aider.").

Alors, comme souvent dans ces cas-là, j'ai commencé à imaginer que j'y étais, que j'y étais déjà, et qu'au lieu de passer mes journées enfermé dans un bureau à m'occuper de projets plus barbants les uns que les autres (je ne rentrerai pas dans les détails, mais sachez que ça a un rapport avec les télécommunications - oui, je sais, on baîlle déjà), je travaillais dans une maison d'édition. Que j'étais éditeur (directeur éditorial, directeur de collection, ce genre-là).  Que je vivais de livres. Que je ne m'occupaisque de ça, que c'était mon métier.

Sauf que pour la première fois, quand je me suis vu arriver en comité de lecture avec mes petites fiches de synthèse sous le bras (échangeant au passage quelque remarque flirteuse avec Tania, la dernière petite stagiaire arrivée pour l'été), quelque chose avait changé par rapport aux fois précédentes. Je ne travaillais plus chez Gallimard ou Grasset. C'était ma maison d'édition. C'était moi qui avait organisé la réunion. Et on n'était peut-être pas très nombreux, mais on était chez moi.
- Bon sang, mais c'est bien sûr !
Je reçus la révélation tel Raymond Souplex cinq minutes avant la fin (sauf qu'avec lui les passagers du métro ne se lèvent pas pour changer de place en faisant entre eux des moulinets de l'index à la hauteur du front). Bon sang mais c'est bien sûr, puisqu'on ne pouvait compter sur personne, puisqu'il n'y avait aucune chance (avec les études que j'ai faites, et l'expérience acquise depuis) que je finisse par réussir à me faire embaucher chez un éditeur - et si cela arrivait, pour faire quoi ? lecteur-stagiaire ? -, alors pourquoi ne pas fonder, moi-même, ma propre maison d'édition.
Une branche littérature générale, parce que c'est ce que j'aime ; et une branche "beaux-livres", "essais", "livres d'art" (je ne sais pas encore, excusez-moi, tout ça est arrivé jeudi dernier !) afin d'assurer l'assise financière de la première.

Il faut me comprendre aussi : depuis toujours, je me disais que créer et diriger une entreprise, quelle qu'elle fût, c'était pas pour moi. Que j'étais entièrement en phase avec le principe de laisser quelqu'un d'autre avoir l'énergie et l'envie pour se taper les formalités administratives et financières, décider des grandes orientations stratégiques, prendre en charge la partie commerciale (s'il y a bien quelque chose que je déteste, c'est de devoir plaire aux gens), assumer les risques, etc... - par contre, si cette même personne cherchait quelqu'un à salarier confortablement et de préférence pour une durée indeterminée (ou déterminée par mon degré d'endurance à l'ennui du travail sus-cité), ça m'allait tout à fait. Et ce soir-là, pour la première fois, je me suis dit : "Et pourquoi ça ?"

Pourquoi est-ce que je ne serais pas le genre à créer ma société ? Si c'est pour faire ce que j'ai toujours envie de faire, mieux : ce que je sais être parfait pour faire ? (Tout ce processus mental était évidemment parocuru d'images de moi traversant Saint-Germain des Près pour aller à des rendez-vous importants, discutant avec des auteurs dans mon bureau, invitant Tania à dîner pour me parler des derniers manuscrits qu'elle avait lus. C'était vraiment un des meilleurs trajets en métro que j'avais jamais vécus.)

Réfléchissons trente secondes : je n'ai pas la formation, je n'ai aucune expérience dans le domaine ni de la création de société ni dans celle de l'édition (mis à part le fait - ha, il était temps de le placer - que j'ai publié un roman et deux nouvelles), je n'ai aucun contact dans ce milieu-là, mes parents non plus, aucun piston, aucune relation... Et quand bien même ! (en plus avec le terrifiant gouvernement de droite qu'on a, mes amis, il a sans doute rarement été aussi facile de monter sa boîte (comme on dit dans notre jargon de spécialistes)).

A suivre...

(* voir notre publication à venir : "Avoir un fan : comment le gérer ? Que faire s'il s'incruste ?")



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Commentaires
J
Moi aussi je n'ai aucune formation, je suis une brèle en gestion, mais je me suis fait sur le tas...si tu veux je peux t'aider !
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